Publié le : 4/12/25 1:05 PM
Dès 2026, le paysage de l’approvisionnement en gaz domestique au Cameroun sera marqué par une évolution significative : une nouvelle taxe de 12,5% sur le droit d’accises sera appliquée aux bouteilles de gaz domestique importées. Cette mesure, inscrite dans la dernière loi de finances adoptée par les parlementaires, vise explicitement à stimuler la production nationale et à offrir un avantage concurrentiel décisif aux industriels locaux.
Cette disposition fiscale pourrait redessiner le marché, traditionnellement dépendant des importations, et s’inscrit résolument dans la politique d’import-substitution que le gouvernement camerounais s’emploie à renforcer depuis plusieurs années. Le texte de loi, transmis à l’Assemblée nationale le 26 novembre 2025, stipule que \ »les bouteilles à gaz domestique vides importées sont soumises au droit d’accises ad valorem au taux réduit de 12,5% ». En l’absence de modifications futures, cette taxe renchérira mécaniquement le coût des importations. L’objectif est clair : dissuader les distributeurs et négociants de recourir au marché extérieur, favorisant ainsi le captage d’une part conséquente du chiffre d’affaires annuel estimé à environ 8 milliards de FCFA, généré par les quelques 440 000 bouteilles de gaz domestique importées chaque année, selon les estimations du Groupement des professionnels du pétrole (GPP).
L’initiative locale encouragée
Cette incitation fiscale intervient dans un contexte d’émergence progressive d’une filière de production locale. Jusqu’en 2021, le Cameroun dépendait entièrement des importations pour ses bouteilles de gaz domestique. Le paysage a commencé à changer à partir de 2022, lorsque Prometal Groupe, acteur majeur de la transformation de l’acier en Afrique centrale, a lancé la première production de bouteilles « made in Cameroun », issues d’une usine moderne implantée dans la zone industrielle de Douala-Bassa. Cet investissement colossal, évalué à 12 milliards de FCFA, a doté le pays d’une capacité de production annuelle de 600 000 bouteilles. Cette capacité excède déjà la demande nationale officielle, qui se situe officiellement entre 450 000 et 500 000 unités, ouvrant ainsi de potentielles perspectives d’exportation d’au moins 100 000 bouteilles par an une fois le marché intérieur saturé.
L’écosystème local tend à se densifier et à se diversifier. Outre l’usine de Prometal Groupe, des sources font état de l’implantation d’une unité de production chinoise dans la zone industrielle de Bonabéri à Douala. Parallèlement, en début 2022, l’Agence de promotion des investissements (API) a officialisé la signature d’une convention avec la société Africa Cylinder Company Sarl. Cette entente porte sur la construction d’une unité de production de bouteilles de gaz, tant domestique qu’industriel, également à Douala, pour un investissement annoncé de 4 milliards FCFA. Cependant, les détails sur l’avancement de ce projet demeurent discrets.
Malgré ces dynamiques, le parcours de certains acteurs a été moins linéaire. En 2021, Akeno SA avait suscité un certain engouement en annonçant l’arrivée prochaine sur le marché local de ses premières bouteilles de gaz domestique translucides, issues d’une usine dont la construction avait débuté en 2018, en périphérie de Yaoundé. L’entreprise s’était engagée à atteindre une capacité de production annuelle de 350 000 bouteilles. Quatre ans plus tard, les volumes promis ne se sont pas encore matérialisés de manière significative dans les points de distribution à travers le pays, illustrant les défis inhérents à la montée en puissance industrielle.
La décision gouvernementale de durcir les conditions d’importation s’aligne donc fermement sur la stratégie d’import-substitution. Cette politique, conçue pour réduire la dépendance vis-à-vis des marchés extérieurs, cherche à dynamiser la production locale par des mesures réglementaires et fiscales ciblées. Les effets attendus de cette démarche sont multiples et ambitieux : création de valeur ajoutée et d’emplois grâce à une offensive industrielle soutenue, amélioration de la balance commerciale par la diminution des importations, accroissement des recettes fiscales pour le Trésor public, et ouverture de nouveaux débouchés à l’exportation. Si la nouvelle taxe atteint ses objectifs, elle pourrait marquer un tournant décisif pour l’industrie des bouteilles de gaz au Cameroun, renforçant son autonomie et sa compétitivité.